Les marchés observent de près la rencontre entre les responsables américains et russes, qui s’est tenue pour la première fois depuis des années.
Les marchés observent de près la rencontre entre les responsables américains et russes, qui s’est tenue pour la première fois depuis des années, afin de discuter d’une éventuelle résolution de la guerre en Ukraine. « Les investisseurs se demandent si cette poussée diplomatique inattendue est le signe d’un changement significatif ou simplement d’une nouvelle posture géopolitique », déclare Nigel Green, PDG de deVere Group, l’une des plus grandes organisations indépendantes de conseil financier et de gestion d’actifs au monde. Le secrétaire d’État américain Marco Rubio et le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov se rencontrent à Riyad, marquant les pourparlers de plus haut niveau entre Washington et Moscou depuis 2022. Mais l’absence de représentants ukrainiens et de l’Union européenne soulève des questions quant à la possibilité de réaliser de réels progrès et quant à ce que cela signifie pour les marchés dans les mois à venir.
La réaction immédiate du marché a été mitigée. Les actions européennes, notamment le STOXX 600 et le DAX allemand, ont enregistré des gains modestes, reflétant un optimisme prudent quant à la capacité de la diplomatie à atténuer les tensions économiques. Le pétrole reste toutefois très volatil, le Brent fluctuant autour de 82 dollars le baril, les traders évaluant si ces discussions auront un impact sur les flux énergétiques mondiaux ou renforceront simplement le statu quo. Dans le même temps, le dollar américain s’est raffermi face aux devises sensibles au risque, reflétant la prudence des investisseurs. « Les marchés aiment la stabilité, et cette réunion ouvre au moins la porte aux négociations », déclare Nigel Green. « Mais sans l’Ukraine et l’UE à la table des négociations, il y a toutes les chances que cela se transforme en une nouvelle impasse géopolitique sans véritable soulagement économique. » Il poursuit : « Les discussions pourraient influencer tout, des politiques commerciales aux budgets de la défense. S’il y a des signes de progrès, les actifs à risque comme les actions européennes et les devises des marchés émergents pourraient se renforcer. Cependant, une impasse persistante ou une escalade de la rhétorique pourrait pousser les investisseurs à se tourner davantage vers des actifs refuges, intensifiant la pression sur les obligations et l’or. »
" La véritable question pour les investisseurs est de savoir si nous nous dirigeons vers une désescalade ou une fragmentation économique continue"
Les marchés s’adaptent déjà à une économie mondiale fragmentée, ajoute Nigel Green. Les conséquences économiques plus larges vont bien au-delà d’un seul événement diplomatique. L’économie russe s’est contractée sous l’effet des sanctions occidentales, avec un PIB en baisse de 2,1 % en 2022 et des difficultés persistantes malgré les efforts de réorientation des flux commerciaux. Pendant ce temps, l’économie ukrainienne a subi un effondrement historique, avec un PIB en chute de plus de 29 % en 2022 et ne commençant à se stabiliser qu’en raison d’afflux massifs d’aide internationale. Dans le même temps, l’UE a engagé plus de 134 milliards d’euros pour soutenir la reprise de l’Ukraine, un effort budgétaire massif qui pourrait peser sur les budgets européens pendant des années. Plus la guerre se prolonge, plus les capitaux mondiaux seront redirigés des opportunités d’investissement à long terme vers la gestion de crise à court terme. « Ces discussions peuvent stimuler le sentiment à court terme, mais la véritable question pour les investisseurs est de savoir si nous nous dirigeons vers une désescalade ou une fragmentation économique continue. »
Si tout engagement diplomatique entre Washington et Moscou est important, ces discussions comportent des réserves majeures. En l’absence des principales parties prenantes et avec une incertitude élevée, les marchés mondiaux seront sur le qui-vive dans un avenir proche. « Il ne s’agit pas seulement de l’Ukraine, mais aussi de l’équilibre des pouvoirs sur les marchés mondiaux », conclut Nigel Green. « Les investisseurs avisés se positionnent déjà pour de multiples scénarios, allant d’un éventuel accord de paix à un réalignement économique prolongé. Quoi qu’il en soit, le monde financier est en train de changer, et les portefeuilles doivent évoluer avec lui.»