Nicolas Bouzou : retraite par capitalisation ?

Nicolas Bouzou : retraite par capitalisation ?

Nicolas Bouzou : retraite par capitalisation ?
Économie et Finance
Jun 4, 2025
Par 
Benjamin Danielou

Nicolas Bouzou est un économiste et essayiste français,fondateur du cabinet Asterès et chroniqueur dans les médias

Vous avez récemment évoqué la nécessité d’introduire une dose de capitalisation dans le système de retraite français. Comment cela pourrait-il concrètement se mettre en place sans creuser les inégalités ?

Nous sommes l’un des rares pays à ne pas avoir introduit de capitalisation dans notre système de retraite, alors que la plupart des grandes économies l’ont fait. Aujourd’hui, les conditions démographiques et économiques ne nous permettent plus de continuer avec un système reposant uniquement sur la répartition. Concrètement, il faudrait créer un pilier de capitalisation collectif, via des fonds de pension, qui seraient très bien gérés et accessibles à tous. 

On pourrait inciter les français à investir sur un  PEA ? 

Je suis partisan du développement du PEA, qui est un bon outil, mais il reste  individuel. Pour garantir l’équité, il faut une solution collective, car sinon seuls ceux qui ont déjà du patrimoine en profitent. Par ailleurs, investir dans des entreprises stratégiques, y compris dans le secteur militaire, via ces fonds, permettrait de soutenir notre économie sans alourdir la pression fiscale.

2. Dans vos analyses, vous insistez sur le rôle de l’intelligence artificielle dans la transformation des entreprises. Quels secteurs français risquent, selon vous, d’être le plus bouleversés dans les cinq prochaines années par l’IA ?

L’intelligence artificielle va transformer tous les secteurs, de la comptabilité à la santé, en passant par l’industrie et l’éducation. Elle ne va pas seulement remplacer des tâches : elle va bouleverser l’organisation du travail et la façon de penser les compétences. Contrairement à l’idée d’une hyper-spécialisation, l’IA va permettre aux humains de redevenir plus généralistes, en prenant en charge les tâches techniques et répétitives. Par exemple, en médecine, l’IA peut poser des diagnostics très précis, mais le médecin pourra se recentrer sur l’accompagnement du patient, la prise de décision complexe et la pédagogie. Ainsi, l’IA valorisera les profils polyvalents, capables de relier les disciplines et de donner du sens à l’innovation.

3. Vous alertez sur le retard technologique de la France face à l’Asie, notamment dans l’automobile. Que peuvent faire les entreprises françaises pour concurrencer la Chine, qui est structurellement en avance ?

Le retard de l’Europe dans certains secteurs est largement de sa propre responsabilité : un cadre réglementaire trop complexe, un manque de projets industriels communs et une difficulté à investir massivement dans l’innovation freinent sa compétitivité. Pendant ce temps, la Chine a pris une avance considérable. Pourtant, l’Europe conserve de vrais atouts, notamment dans des domaines comme le spatial, l’aéronautique ou certains secteurs industriels de pointe. Ces forces montrent qu’avec une meilleure coordination et des investissements ciblés, l’Europe peut rester un acteur majeur sur la scène mondiale.

4. Face à la domination asiatique sur la production industrielle et l’innovation, quelle place la France peut-elle espérer occuper dans les chaînes de valeur mondiales dans dix ans ?

Je pense que la France peut retrouver une place centrale, mais à condition de réformer en profondeur. Il faut s’attaquer à la racine des problèmes, comme Napoléon l’a fait en 1804 avec le Code civil : aujourd’hui, nous sommes noyés sous les normes et les réglementations. Le contexte géopolitique actuel, avec une Europe livrée à elle-même, nous oblige à réagir. C’est souvent dans ces moments de crise que l’Europe sait se transformer. Si nous faisons les réformes nécessaires, notamment sur la formation, l’innovation et la simplification administrative, la France pourra retrouver une place de leader dans les chaînes de valeur mondiales, notamment dans les secteurs technologiques et industriels d’avenir

Vous êtes un optimiste ?

Je ne nie pas les difficultés actuelles, mais je crois en la capacité de la France à rebondir. Notre histoire montre que, même dans les pires moments, nous savons nous relever, innover et avancer. Ce n’est pas de l’optimisme naïf, mais une confiance lucide dans la résilience du pays.

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